Oui ou non aurons-nous du charbon ?

Mais M. Bevin fait la sourde oreille

(De notre envoyé spécial à Moscou, Georges Le Brun Keris)

4/1947

Depuis deux jours, la partie se joue entre la délégation française et la délégation anglaise à propos du charbon et du niveau industriel de l'Allemagne. Hier, un exposé de Georges Bidault en fut l'épreuve principale.

Oui ou non, aurons-nous du charbon ? Si on le dégage de la prudence diplomatique et de sa tradition, l'exposé de Georges Bidault pourrait être résumé en cette formule. Non pas qu'on doive négliger le fait que nous demandions, comme les Russes, l'établissement d'un régime transitoire dans la Ruhr, puisque le traité allemand peut n'être signé que dans très longtemps. Non  pas également qu'il faille négliger notre position en ce qui concerne l'acier. Une fois de plus, Georges Bidault a affirmé que l'Allemagne devait en produire en quantité relativement faible, 7 ½ millions de tonnes, quitte à ce que la France, la Belgique et le Luxembourg lui en fassent livraison afin qu'elle puisse exporter des produits finis pour acquitter ses réparations.

Mais le charbon est pour nous un problème capital, puisqu'il est immédiat. Il prime tous les autres parce qu'il est proprement vital ; M. Alphand, directeur des Affaires économiques au Quai d'Orsay, le répétait encore en sortant de la réunion. On remarquera le passage où le président de la délégation française a affirmé : sur les instructions de mon gouvernement, je déclare que nous ne pouvons adhérer à un accord sur les autres problèmes posés (unité économique, niveau industriel, réparations) sans qu'ait été préalablement réglé le régime des exportations de charbon dans un sens conforme à nos demandes.